Dans la morosité d’octobre, Croc’ The Rock est l’étincelle rock qui ravive la flamme du mélomane en manque d’une drogue qu’il côtoya quelques mois durant : les festivals d’été. Dans une période creuse, l’événement qui se tient dans le village d’Étagnières peut se targuer de ramener une programmation audacieuse. Et pour sa soirée d’ouverture ce jeudi, le festival n’aura pas déçu avec Dommengang, Pillow Queens et Crows.
Sans compter sur un public massif remplissant la Salle de l’Étang, Croc’ The Rock a tout de même pu apercevoir que le parterre de la salle communale s’est mobilisé un soir de semaine. Et sans nul doute, la venue des trois têtes d’affiches ont joué un rôle. À commencer par le groupe Dommengang.
Du rock, en veux-tu en voilà!
Originaire de Portland, ce power trio a su charmer un public de passionnés par son rock troubadour, virevoltant d’une cime à l’autre de l’État de l’Oregon. Il y a déjà deux chanteurs, l’un à la basse et l’autre à la guitare, qui prennent à bras le corps une scène qui s’avère encore aujourd’hui trop petite pour le talent de ces musiciens. C’est aussi l’occasion d’apercevoir, assez distinctement avec ses cheveux longs, le batteur de la formation américaine qui martèle ses fûts comme un Dave Grohl chez Nirvana. Il engendre une fougue communicative qui s’empare d’un public encore peu nombreux au début du set, mais qui ne peut s’empêcher de quitter l’Auberge, nouveau lieu sous tente à l’extérieur de la salle et qui dédie son espace à la restauration locale.
Une cuisine simple qui fait écho à la musique de Dommengang qui, sans artifices nous sert un rock psychédélique efficace comme à travers le duo d’entrée Sunny Day Flooding (de l’album No Keys) et Pastel City (de l’album Love Jail) où les notes lacérées de la lead guitare se mêlent à la réverbération d’une voix. Sympathique sur scène, le trio ne manquera pas de jouer deux titres finaux d’un set rondement mené avec Myth Time et Everybody’s Boogie, issu de l’album du même nom. Proposant des phases instrumentales autant envoûtantes qu’enivrantes par le subtil jeu de sonorités dissonantes proposées par le guitariste, l’avant-dernier titre sera d’ailleurs à écouter dans un nouvel album à paraître au printemps prochain. Et nul doute que l’évolution progressive du groupe laissera transparaître un essai musical riche et prometteur.
Un vent frais venu d’Irlande
Prometteur, c’est aussi le terme qui peut être utilisé pour le deuxième groupe jouant sur scène ce jeudi soir. Il faut dire que derrière le talent musical subsiste un groupe, Pillow Queens, qui se forme d’un quatuor de femmes dublinoises inspiré de la scène locale menée tambour battant par Fontaines D.C. notamment. Pourtant, leur musique vendue comme telle s’avère bien plus calme qu’imaginée… dans le bon sens du terme. Leur indie rock allient leurs voix pour sublimer le rugissement de leurs instruments, mais aussi pour exprimer leur gratitude d’être invitée à nouveau en Suisse. Car auparavant, Pillow Queens avait déjà joué à Thoune devant un public conquis à leur cause.
À travers leur set joué durant une heure, le public a pu ressentir aisément la complicité émanant de ces femmes et qui marque sincèrement les esprit. Ces quatre femmes justement sont là pour montrer leur talent scénique, mais aussi partager un moment de plaisir entre elles à coups de vannes et de sourires. La batteuse Rachel Lyons, à peine en dessous des autres en terme d’intensité scénique, tient tout de même la baraque avec une rythmique solide et scolaire à défaut d’être énergique. Elle permet au moins à ses deux guitaristes Sarah Corcoran et Cathy McGuiness et à la bassiste Pamela Connolly en avant scène de s’exprimer pleinement face aux spectateurs vaudois. C’est d’ailleurs McGuiness qui se démarque, avec sa fougue qui captive tous les yeux de la salle malheureusement clairsemée.
On imagine sans peine que les soirées du vendredi et du samedi vont attirer les foules. En attendant, la première soirée fût une réussite grâce notamment à la conclusion menée par le groupe de post punk Crows. Une claque britannique, proche d’Idles, qui est à suivre de près. Son chanteur James Cox y est pour beaucoup : c’est une véritable bête de scène qui n’hésite pas à haranguer la foule ou s’y mêler. Fort.