Au coeur d’une programmation aussi dense que le bois qui porte son nom, le festival de La Bâtie (3 au 19 septembre 2021 à Genève) a déniché sûrement l’une des plus belles perle de sa programmation pour La Gravière. Car avec Los Bitchos, l’organisation assurait au public venu nombreux de passer une heure incroyable hier soir. Vraiment.




Entre rythmes effrénés, couplés de sonorités venus des quatre coins du globe, le quatuor de musiciennes venu tout droit d’Angleterre a prouvé que le pays de la Reine reste roi en pourvoyeur de talents musicaux. Elles sont les protégées d’Alex Kapranos (Franz Ferdinand) et ont joué en première partie pour Black Lips ou Ty Segall. Rien que ça ! 

Accompagné sur scène par un guitariste, le groupe fondé à Londres a su faire transiter les émotions de toutes celles et ceux qui se sont déplacés un mercredi soir pluvieux jusqu’au club de la Jonction qui affichait complet. Dès les premières minutes avec FFS, la magie opère comme si rien ne pouvait arrêter ces musiciennes aux origines diverses (Angleterre, Suède, Australie, Uruguay). Elle s’opère donc par un aller-simple direction l’Orient, avec des sonorités osées par la charismatique guitariste Serra Petale. 

Sur sa Fender Stratocaster d’un rouge à faire brûler les planches, elle dégage une prestance rarement vue sur scène. À la fois joviale et sauvage, elle motive ses troupe comme une vraie frontwoman. La batteuse Nic Crawshow prend très vite le relais derrière les fûts en martelant son instrument, sans oublier les bongos devant elle qui amènent un certain plus dans la rythmique si particulière du groupe. Elle oscille entre le surf pop, le rock psychédélique ou encore la cumbia comme sur la troisième chanson Tropico

En fait, c’est joué si naturellement et avec tant d’enthousiasme que les frontières entre les Amériques, l’Afrique et l’Orient s’effacent. Les bras et les jambes bougent de partout dans la petite salle de la Gravière, dont le thermomètre commence à arriver à ses limites. La chaleur humaine et musicale empreigne tout le monde, des musiciennes aux spectateurs. L’apothéose arrive très vite déjà, avec les premières notes de The Link Is About To Die et son riff de guitare qui reste toute une nuit dans la tête. 

Une énergie vivace sur scène

Derrière cette joie communicative, il y a toujours la discrète Josefin Jonsson à la basse. C’est sans conteste le socle de son groupe, elle qui reste impertubable derrière une grande maîtrise de jeu au doigt. Sans s’exposer, elle s’impose et accompagne le reste de là setlist qui comprend de nombreux titres inconnus du grand public. Car pour ceux qui écoute Los Bitchos part l’intermédiaire des plateformes numériques, ce sont trois chansons qui sont proposées. Il y en avait treize au total. Une générosité qui fait plaisir. 

On notera dans le lot une reprise réussie de King Gizzard, Trapdoor, dont l’influence dépeint sur le groupe comme l’est le groupe Altin Gun. Il y a aussi l’énergique Yulele, la conclusion Las Panteras ou l’efficace Good To Go qui ont fait leur effet. Cette dernière, mystérieuse par son introduction et son esprit surf rock californien, était magnifiée par des lumières bleu et violette. Car pour de nombreux autres titres, l’accompagnement visuel était réussi. Il manquait juste un peu de puissance dans les parties à la voix (qui étaient minimes) pour donner plus de substance à l’énergie vivace de Serra Petale et sa comparse pianiste Agustina Ruiz.  

Quittant la scène sans rappel, mais en invitant le public à les rejoindre pour une bière, les filles de Los Bitchos sortent des sentiers battus, comme l’est leur musique. Leur enthousiasme fait qu’on a envie de passer plus de temps en leur compagnie, pour jammer et s’amuser jusqu’au bout de la nuit. Voilà une claque que l’on reprendrait avec plaisir.

Sun Cousto met le feu en première partie

Groupe suisse basé à Lausanne, Sun Cousto ouvrait la soirée avec un rock garage des plus efficaces. Le public assistait presque à une sorte d’exorcisme de toute cette frustration accumulée depuis une année sans concerts. Car non, le streaming vidéo ne compte pas.

Au menu donc, une musique fraîche et sans contraintes qui met en avant Julie et Isumi, deux jeunes femmes dont l’une tabasse la batterie et l’autre écorche la guitare. Toutes deux passent aussi derrière le micro, avec des harmonies vocales qui sont parfois bien menées. Derrière un jeu efficace à la Velvet Underground ou Dead Sara qui frôle l’implosion sonore par des hurlements et des distorsions à tout va, Sun Cousto pousse à entreprendre une révolution. Laquelle, nul ne le sait. Mais en tout cas pour le meilleur : ça donne envie de tout casser, recommencer nos projets à zéro et surtout s’amuser. 

Derrière des imprécisions inévitables lorsque vient le temps de jouer avec autant d’énergie sur scène, ces musiciennes décomplexées prennent la scène comme un espace de jeu. Il y a ni faussetés ni hypocrisie dans leur attitude, seulement de la spontanéité qui rend l’entame de cette soirée tout simplement jouissive pour les oreilles. Elles sifflent encore, mais pour le meilleur. 

Le Festival La Bâtie propose encore une série de concerts et de performances artistiques jusqu’au 19 septembre. N’hésitez pas à visiter leur site pour plus d’informations, par ici.