Face aux lueurs rosées du ciel, les masques effacent des sourires qui se dessinent sûrement sur les visages des amoureux des Bains des Pâquis. Montre en main, il est six heures du matin et le vénérable café se tient au creux des mains de beaucoup de curieux et d’habitués venus découvrir Forever Overhead.



Comme chaque jour depuis une semaine, les Aubes musicales (1er au 23 août) entament une nouvelle aventure pour mélomanes et baigneurs et laissent entrevoir une pépite ce mercredi. Le duo genevois explore une folk-pop saupoudrée d’une pincée de psychédélisme. Sous leur patronyme commun qu’est Dinkel, Julien et Lorraine dégagent une tendre synergie dès leur arrivée devant un public conséquent pour une heure si proche du sommeil. Il y a chez eux l’insouciance de l’enfance qui se mêle à l’assurance de l’adulte lorsqu’ils passent derrières leurs instruments respectifs.

Parce que oui, le spectateur découvrira progressivement un duo qui joue finalement pour quatre. Dès l’introduction, Julien, aussi à l’aise à la guitare qu’au chant, offre de fines harmonies mélodiques et vocales venues de l’espace tandis que sa sœur, sereine, triture des pitchs sur ses consoles. Le public atterri sur un titre de Ben Reed, Errata, dont la magnifique reprise le rend attentif d’emblée.


Le soleil se cache encore, la fratrie fait l’inverse


Une chanson, et le décor est donc déjà posé. Sur le titre original qui suit, Sad Success, Lorraine se mue d’un coup en Victoria Legrand, leader du groupe Beach House. Le son rétro posé avec aplomb sur le synthétiseur, accompagné d’une voix vaporisante, laissent imaginer la force créative qui anime les deux musiciens. Leurs influences sont multiples, en témoigne des parcours menés sur divers projets, dont celui de Melissa Kassab pour Lorraine et Quiet Island chez Julien.

Justement, le batteur de formation se met en place sur Hereditary en tapant du pied sur la grosse caisse pour accompagner son subtil jeu de guitare. Au refrain très accrocheur, Lorraine le rejoint au synthétiseur pour renouveler ce duo touchant qui remerciera les Bains pour ce contexte fabuleux. C’est totalement vrai : à écouter de la musique avec près de 20 degrés, les pieds dans l’eau, on oublie presque que Genève est juste derrière.



Un potentiel certain


C’est probablement le Brésil qui n’est pas très loin, Forever Overhead allant de ses variantes rythmiques et mélodiques pompées de la bossa nova sur Floss. Sur sa lancée, Julien n’hésite pas à poursuivre sur un solo qui trouble sans nul doute les sens rythmiques de nombreux spectateurs. Grandiose.

Aussi aériens que les oiseaux de la canopée des Bains, les membres de Forever Overhead portent bien leur nom de scène. Comptant sur la poursuite réussie de la setlist avec le final Likely ou la détonante Spring Sparles (des chants de coq et alertes de coucou-suisse seront joués pour réveiller la foule), le duo genevois a bravé avec brio le réveil en pleine nuit pour distiller sa musique exploratoire.




Moins LO-FI qu’en écoute sur la toile, leur son à la croisée des styles prend le chemin d’un potentiel certain, surtout lorsqu’il met en évidence les talents des Dinkel. On oubliera presque de cette matinée la mitigée reprise du titre Don’t Let Me de Britney Spears, dont l’autotune utilisé par Lorraine dessert grandement sa voix si envoutante quand l’effet n’est pas là.  

Finalement, ce n’est qu’un bémol isolé au cœur d’une matinée qui aura ravi des cœurs meurtris par l’absence ces temps de présence culturelle. Retrouvez d’ailleurs la programmation complète des Aubes ici ou sur notre calendrier. L’achat d’un billet au prix symbolique de 2.- sur la billeterie est fortement conseillé, et le port du masque est obligatoire.