Après son passage remarqué au dernier Paléo sur la scène du Club Tent, Les Créatives et l’Épicentre présentaient jeudi l’éclectique Uche Yara. Elle a su émerveiller le public de Collonge-Bellerive pour ce concert touchant, explosif, et unique.
La directrice du festival et le programmateur de l’Épicentre montent sur scène pour introduire l’artiste, rappelant qu’elle aurait dû être programmée en 2024 avant que son concert ne soit reporté. Iels expriment le plaisir et l’honneur d’accueillir cette jeune musicienne montante pour cette collaboration.
La salle de Collonge-Bellerive travaille depuis de nombreuses années avec Les Créatives, et propose régulièrement de véritables pépites. Ce soir n’a pas fait exception.
La première partie des Rolling Stones à Collonge-Bellerive
L’artiste autrichienne de 22 ans, d’origine nigériane et installée à Berlin, montre dès son arrivée que la scène est son terrain naturel. En 2022, fraîchement diplômée, elle assurait déjà la première partie des Rolling Stones en tant que guitariste du groupe Bilderbuch. Elle a donc commencé sa carrière directement en live, avec des concerts de plus en plus électriques.
Il suffit de quelques secondes pour percevoir son aisance et l’aura qu’elle dégage. Uche Yara réinvente les codes du live, en faisant de la scène son terrain de jeu, laisse volontiers ses musiciens prendre la lumière, tout en captant instantanément l’attention d’un public malheureusement peu nombreux ce soir-là. Sa vulnérabilité assumée se mêle à une puissance scénique rare, portée par un charisme indéniable.
Uche Yara fait partie de ces artistes qu’il est impossible de catégoriser. Vivifiante, avant-gardiste, sa musique expérimentale et directe ne se pose aucune limite. Influencée par Tierra Whack, James Blake ou Tyler, the Creator, elle s’attache toutefois à créer un son qui lui appartient, neuf et distinctif.
On peut l’associer à la neo-psychedelia, nourrie de la musique psychédélique des années 60-70 (inspiration d’ailleurs visible jusque dans le look baba cool de sa guitare) tout en y mêlant post-punk, rock psychédélique, pop ou folk. Certains titres flirtent même avec la soul, le funk, le RnB, la pop alternative, et ponctuellement des sonorités club ou afro.
Une grande amplitude vocale
Portée par une voix tantôt rythmée, légère, rebondie ou étonnamment grave, la multi-instrumentaliste relève avec brio tous les défis qu’elle se lance. Sa voix profonde se déploie avec aisance dans une large amplitude d’octaves.
Avant d’entamer Lazy Sundayz, l’un des premiers morceaux qu’elle a écrit lorsqu’elle avait 18 ans, l’artiste confie que c’est celui qu’elle préfère jouer en live, davantage pour la musicalité des mots que pour leur histoire. Et on comprend très vite pourquoi, cette chanson révèle pleinement son amplitude vocale, capable de passer des graves, aux ton classés d’androgynes, aux aigus.
Après avoir expérimenté l’écriture centrée sur la sonorité des mots, elle aborde désormais des chansons porteuses d’un propos plus précis. Zuu, par exemple, raconte l’histoire du point de vue d’un « zookeeper » et a d’ailleurs été présentée sur Colors. Ses thèmes s’étendent aujourd’hui de la conscience environnementale à l’amour ou à la notion de chez-soi.
Un moment d’émotion intense
Le concert a connu un moment d’émotion intense, puisqu’il s’agissait du dernier dans cette configuration avec ses musicen·nes. Elle en profite pour leur dédier not far from home, qu’elle interprète seule à la guitare avant de leur offrir des fleurs. Ils se prennent dans les bras, visiblement émus, avant qu’elle ne conclue son set avec quelques larmes aux yeux. Elle termine avec son titre phare, www she hot, qui relance le public dans une ultime danse.
En conclusion, voir Uche Yara en live est une expérience en soi. Il est rare d’assister à un concert d’une telle intensité, d’autant plus venant d’une artiste aussi jeune.
En une heure, elle a ému, fait rire, danser et vibrer le public, démontrant une maîtrise remarquable de sa guitare, de sa voix et de la dynamique entre ses morceaux. Une révélation à suivre de très près.
