© Victor Perrin

Après Phoam jeudi, la lumière était braquée sur un autre projet suisse vendredi pour Les Hivernales. Chien Bleu, rappeur genevois, a montré à l’Usine à Gaz qu’il faisait partie des tous meilleurs en Suisse romande. Et qu’il pouvait, légitimement, aller plus loin. Plus haut. 



Ce concert s’est donc déroulé vendredi, et presque deux jours se sont écoulés depuis la deuxième soirée des Hivernales à Nyon. Des événements personnels peuvent empêcher, évidemment, de relater un concert le lendemain. Ici, c’est d’une part vraie. L’autre, c’est que la performance sur scène du rappeur local, venu pas loin de Genève, aura subjugué une belle part du public de l’Usine à Gaz. Ou peut-être bien sa totalité. Moi compris, et il fallait s’en remettre.

Chien Bleu est un artiste reconnaissable, mais peut-être pas encore reconnu à sa juste valeur. À regrets. Ce n’est pas lui qui s’est exporté chez nos voisins français comme l’ont fait Di-meh, Makala ou Slimka. Non, Chien Bleu est là. Un Genevois, avec ambition et humilité. L’humilité de ne pas chercher la facilité quand certains lancent seulement une bande-son. Son passé dans le punk avec Sergent Papou parle pour lui. Il n’y a pas de simplicité lorsque ses productions peuvent être magnifiées, bien qu’il se soit reconverti au rap.

Une forte présence sur scène

Lui, contrairement à d’autres, s’amène sur scène avec son vocodeur maîtrisé et pas moins de quatre musiciens… et tous talentueux évidemment. Il y a un batteur qui amène de l’énergie aux morceaux, un bassiste qui soutien parfaitement le rythme, un guitariste qui offre une ambiance parfois céleste et cet ajout récent d’un synthétiseur qui propose une profondeur à des morceaux autant puissants qu’attendrissants. C’est le charme du répertoire de Chien Bleu: il est lisible et accessible, mais sort aussi des sentiers battus. 

D’ailleurs, là encore avec humilité, Valentin Tengler, de son vrai nom, entrera sur scène après une longue introduction instrumentale qui laissera de marbre le public. Sa sortie sera la même, laissant son guitariste Henry Sims sur un solo envoûtant. Magistral. Mais il n’y aurait pas que cet accent musical à raconter. Sur scène, il y a une puissance, évidemment renforcée par la forte musculature du jeune homme, qui se dégage et marque les esprits.

© Victor Perrin

Sans en faire trop, Chien Bleu sort de sa cage tel un loup enragé et sensible à la fois. Sur J’aime le feu, il se complaît à bouger sur son espace en arc de cercle qui fait presque office d’arène.C’est lui l’attraction, et il le rend bien au public qui chante sur certains passages comme sur Choisis ou le refrain de Bagarre dans la cour. Autant dire que l’amorce pour le concert suivant de Lewis OfMan aura été parfaite. Ce qu’on peut retenir de ce concert de Chien Bleu, c’est la cohérence et le respect entre les artistes sur scène. Elle était belle à voir. Elle fût encore plus pertinente lorsque vint, par exemple, des moments solennels marqués par La Tête brulée ou Loups, du récent album Jours sauvages

La meute s’est exprimée sur scène, et elle n’aura jamais fait semblant. Il suffit maintenant que la clairière bordant le Léman devienne une forêt traversée par des frontières internationales. Ce serait amplement mérité.