Clap de fin pour la 19e édition du JVAL: une nuit d’énergie pure, un public en transe. Des Drag Queens sur scène et des artistes plongeant dans le public ont rendu la dernière soirée inoubliable.



Pari réussi pour le JVAL, qui a prouvé une nouvelle fois qu’il jouait dans la cour des grands. Cette édition avait une importance particulière, notamment dû au climat d’incertitude après le départ de la programmatrice Maï Kolly. Elle avait marqué les esprits par ses choix ambitieux et son flair pour les découvertes.

La tâche n’était donc pas simple pour Mathéa Léger et Antoine Milesi, les nouveaux programmateurs. Mais la soirée du samedi a su faire envoler tout doute avec des performances d’artistes inoubliables.

© Glenn Mitchell


Un cocktail explosif entre hyperpop, punk et musique électronique, qui a déchaîné le public dès les premières notes, a créé une atmosphère survoltée. Comme si un cercle vertueux s’était installé entre les artistes sur scène et le public pour atteindre des sommets d’intensité rares. Retour sur une soirée jubilatoire.

Théa : l’explosion emo-core aux notes pop

Cheveux roses et casquette vissée sur la tête, Théa, accompagnée de son guitariste AdLib, a ouvert la soirée. Une tâche difficile, peut-être encore plus au JVAL : il arrive que le public soit plus intéressé par la vue et le vin que par le concert.

Autant dire que samedi, le public s’était déjà échauffé. Les tempos rapides ont transformé le parterre de la scène, qui ressemblait à une fin de soirée au bout de 15 minutes de concert devant un public déchaîné. Le flow autotunée de Théa oscille entre pop-punk et même screaming de métal et des beats violents porteur d’une grande énergie énergie brute. Son style emo-core, à la fois brut et sensible, rappelle d’ailleurs celui d’Éloi

Le titre Guillotine a résonné comme un coup de massue, tandis que le public sautait  et bougeait devant la scène. Une énergie a circulé entre la scène et le public enflammé. Des petits moments de répit sont offerts, avec un interlude de ukulélé qui remet de la tendresse dans un univers musical contestataire, désabusé et teinté de spleen.

Sans oublier l’absurde: une cover surprise mais musclée de Kyo Le Chemin, reprise en chœur par les festivalières et festivaliers ou encore le morceau Quoi de neuf les voyous qui reprend le générique de Scooby Doo. Un côté teenage punk assumé de Théa, avec un final en beauté marqué par le slam de son guitariste dans le public. La barre a été mise très haut dès le début. 

©Natacha Vallette d’Osia

crème solaire : le live ultime

Nous en avons parlé dans nos recommandations, le live de crème solaire était l’un des concerts les plus attendus de cette édition 2024. Des attentes élevées, qui peuvent facilement se solder par une déception.

Autant dire que cela n’a pas été le cas. Pour la dernière date de leur tournée, crème solaire a simplement tout explosé. Leur dernier album Cemento appelle à la métamorphose et à l’empowerment, et ce message a pris tout son sens sur la scène du JVAL. La performance de Rebecca Solari, la chanteuse-interprète du duo, a laissé plus d’un spectateur bouche bée.

Sa présence scénique est absolument impressionnante, elle se transforme en bête sauvage, imprévisible et magnétique. Elle est un aimant à regard, elle prend toute la place, tantôt effrayante, tantôt drôle. Pendant que Pascal Stoll tient les platines, les synthés et la guitare et chante, plus statique que sa compère.

Le duo transcende les limites habituelles des artistes, par exemple en ne se limitant pas à une seule langue ou à rester sur scène. Les morceaux sont tour à tour chantés, souvent criés aussi, en français, en allemand, en italien, en anglais et même en romanche.

Pour ce qui est de rester sagement sur scène, ce n’était visiblement pas le projet du duo. Grimper sur la structure, descendre dans le public et créer une grande ligne de séparation dans le public qui laisse place à d’immenses pogos sur le morceau Autobahn. Avant de terminer sur leur morceau Peau/Lisse, qui a laissé la foule scander le refrain emblématique bien connu en manifestation « Tout le monde déteste la police » encore longtemps après le concert. De la rébellion devant un public en transe et uni dans la danse et la sueur.

« C’est le meilleur concert que j’ai vu en 3 ans » nous a confié un festivalier. Ce qui est sûr, c’est que crème solaire se défend comme un des meilleurs lives du circuit.

St Graal : l’électropop poétique

St Graal a conclu cette dernière nuit avec une performance d’électropop dansante, où la poésie des paroles laisse un sentiment doux-amer. Seul sur scène, la plupart du temps, il a su occuper l’espace avec un naturel désarmant. Entouré de sa guitare et de son synthé, le Bordelais raconte des histoires, danse et chante devant un public conquis. Absorbé par la performance, le public ne remarque presque pas que le fond de scène, un grand rideau noir, est tombé, ce qui a bien fait rire l’artiste.

Soudain, une surprise: sur le morceau Drag, deux drag queens majestueuses, en chair et en os, font irruption sur scène. Elles appartiennent à la House of Hermess, il s’agit de Céline Dufion et Rudy Hermess. Elles font des figures portées impressionnantes, des grands écarts et montrent l’étendue de l’art drag. Dommage qu’elles ne soient pas restées plus de deux morceaux !

Concluant sur son morceau le plus connu Les dauphins, St Graal a invité le public à « faire du jet-ski sur des dauphins » dans un final déjanté, finissant la soirée dans une explosion de joie et de décibels.

©Léonard Fisch

L’after concocté par Club Katel

A la fin des concerts, un orage éclate et le public se replie sous la tente principale, habillée de néons et de lasers pour l’after. Club Katel, le collectif nyonnais, s’occupe du closing et certains ne montent au Domaine de Serreaux-Dessous que pour les voir.

Ils ont concocté un set eurodance et trance, teinté de notes pop qui font vibrer le public resté en masse. Les DJ se succèdent derrière les platines en B2B, dans une ambiance électrique. La salle est bondée et reste pleine jusqu’aux dernières notes de Taj Mahal, chanson de fin de soirée traditionnelle de Club Katel. Une magnifique conclusion d’une soirée bouillante.

Cette 19e édition, riche en émotions et en découvertes musicales, a offert aux festivaliers une dernière soirée queer époustouflante. Le cadre enchanteur et l’énergie débordante du public ont contribué à créer une ambiance inoubliable. Alors que les lumières s’éteignent et que les vignes retrouvent leur calme habituel, il ne reste plus qu’à attendre avec impatience ce que nous réservera la 20e édition !*

©Léonard Fisch